La doum de Félicia
Elle est bien réelle, ma doum à moi.
Bien que je sois née au bord de la mer, sable noir –près de la grande bleue des Abymes– j’ai appris à nager à la doum de Fourniols, tout là-haut, après Bezaudin.
Tout là-haut, dans un autre monde entre eau froide et dense canopée.
La doum de Fourniols à Sainte-Marie ! Toute mon enfance sur les traces de mon grand-père, garde-forestier. Gardien des champs de mahoganys, du temps où il fallait du bois précieux pour notre ébénisterie prisée des gens aisés, des grands gens.
C’était tout là-haut, où les charrettes à bœufs nous attendaient pour traverser les cannes de Monsieur Calixte – le mulâtre du Pérou, mulâtre respecté par delà Morne des Esses.
Tout là-haut, une rivière tumultueuse faisait tourner la roue à aube et l’eau jaillissait dans les rigoles, pour le plus grand bonheur des demoiselles les libellules et la vigueur du pwa-pwa.
Comme dans toutes les grandes maisons, le grand bassin rafraîchissait la véranda.
Fi du bassin ! Pour la kyrielle de cousins-cousines, rien de plus revigorant que les plongeons en eau glacée dans la doum de Fourniols qui a abrité les premières amours de mes aînés et les plus belles années de mon enfance.
Félicia Nuissier
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