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Si tu étais un monument ?

 

Je serais la statue de la liberté... un fromager... la maison du poète... un nuage... un mot nu qui ment... la mer... une maison créole...

Et c'est donc bien bâties, que nous sommes parties !

Les murs de Bord de Canal parlent. Pas des murmures, mais des poèmes écrits en gros comme un coeur explosant d'amour pour une femme dont la peau blanche est pire que 3 rhums bus sec. Et ca y va dans le mélo à 2 balles. C'est cheap, et pourtant je me surprends à sourire niaisement devant ce mur amoureux. Un homme qui désire ne lésine pas sur la gomina, les fleurs en plastok et les mots pacotille. C'est touchant. Indéboulonnable.

Dans les wèt de Bord-de-Canal, on chemine, les sens en éveil. On slalome dans une complication d'escaliers, de maisons enchevêtrées gardées par des chats. Ce sont eux les proprios ! On regarde, on touche, on écoute, on sent toutes les matières du quartier. Ces hommes qui charroient des parpaings en faisant la chaine, ces voix, ces musiques derrière les murs... Tout, de ce quartier populaire, transpire de sensations à consigner sur nos pages. Autour de nous, des rubans de poésie qui nous font réaliser que l'on "n'a plus les mollets de nos 20 ans" ou qui nous rappelle qu'un jour, on sut cuisiner le crabe en fricassé.

Le temps est un déboulonneur de vie.

Et sur le malécon, nous prenons notre revanche. A notre tour de déboulonner ce qui nous ennuie, ce qui nous force, ce qui nous offense. Devant le fantôme de D'esnambuc, nous jetons à terre nos mots. Oui, moi aussi, j'en ai gros sur le boulon !

Dans ces cas-là, seule la poésie haïtienne sait comment douciner nos âmes. "Il y a la mer à consoler, les grains de sable à comptabiliser, l'avenir à apprivoiser". Alors, on retrousse nos manches, on détrousse nos bics ; et devant Joséphine qui a perdu sa tête et tout son corps, on imagine avec quoi et pourquoi on bâtirait notre maison des poètes, notre fromager, notre maison créole, notre nuage, nos mots nus qui mentent et la statue d'une nouvelle Liberté. Enfermé, seul dans le jardin du sermac, le fantôme de Schoelcher nous regarde passer, belles et fières, dans nos envies indéboulonnables de nous bâtir.

Conte, rendu by manzelKa

avec Fabienne, Nicole,

Christine, Hermence,

Marie-France

 

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extraits des œuvres lues pendant la trace

Alfred Alexandre - BORD DE CANAL, Ed. Serpent à plumes 2004

Edouard Glissant - L'INTENTION POÉTIQUE

Derek Walcott - LE ROYAUME DU FRUIT ÉTOILE, 1979

Jean-Armoce Dugé - LE SOLEIL EST TROP SEUL, in Anthologie de la nouvelle poésie haïtienne.

Xavier Orville - COEUR A VIE, Ed. Stock 1993

Aimé Césaire - MAILLON DE LA CADÈNE, in Cadastre, Ed. Points 1961

Raphael Confiant - L'HOTEL DU BON PLAISIR, 2009

animatrices

Isabelle Kanor

Véronique Kanor

conceptrice

Isabelle Kanor

Le Labo des Lettres

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